HISTOIRE ABRÉGÉE
DE LA TURQUIE

 

Depuis les origines à l’avènement de la République

 

YILMAZ ÖZTUNA

 

DIRECTION GENERALE DE LA PRESSE ET DE L’INFORMATION

Un Chinois nous parle du Hakan göktürk

 
Le célèbre voyageur chinois Hüan-Dzang fut reçu en 620 par le kagan Göktürk Tung Yabgu, connu pour avoir pris Rey (Téhéran) et Ispahân. Voici ce qu’il rapporte de cette entrevue:

“En entrant dans la ville de Suyab, résidence du Kaðan, je le rencontrai qui rentrait de la chasse dans son palais. ll était vêtu de soie verte; ses cheveux longs flottaient librement. Environ deux cents officiers vêtus de lourdes soieries, dont quelques uns enveloppés de fourrures, l’accompagnaient. Quelques uns portaient des bannières; certains tenaient des javelots et des boucliers. lls étaient suivis de soldats Göktürk. Plusieurs de ceux-ci montaient des chevaux, d’autres des chameaux. Les chevaux étaient fougueux: lls ne cessaient de pieffer et de gratter la terre. Ils étaient si nombreux que je distinguais mal l’extrémité de leur file. Quand le Kaðan m’aperçut, il m’appela pour s’entretenir avec moi. Il me donna l’hospitalité dans une grande tente. Trois jours après, il m’ appela auprès de lui. Les meubles qui se trouvaient dans la tente du Kaðan Göktürk étaient entièrement couverts de brocart d’or, brodés d’or. Les yeux en étaient éblouis. Les nobles turcs appelés “Tarhan” étaient assis sur des nattes des paille étendues par terre. Tous portaient des habits de soie brodés d’or. Le Kaðan m’adressant la parole avec politesse, me dit de m’asseoir. ll ne parlait pas le chinois; un Turc lui servait d’interprête. ll donna audience en ma présence aux ambassadeurs de la Chine. La lettre et les cadeaux apportés du palais en Chine furent offerts au Kaðan. Celui-ci remercia. Ensuite le banquet commença. On apportait du vin dans des coupes. Des musiciens turcs jouaient et chantaient. La musique turque diffère de la chinoise; néanmoins elle réconfortait l’âme et réjouissait l’esprit. En ma qualité de bouddhiste je refusai la viande de mouton et de veau, mais pris les börek (espèce de pâtisserie soufflée), la crême, les plats doux, le miel que l’on m’offrait. Après le dîner on but encore du vin. J’étais surpris du comportement humain, de l’amitié et de l’hospitalité des Turcs, que nous considérons comme si dangereux et en qui nous voyons des barbares. Les Kaðan eut la gentilesse et me témoigna l’amitié de me conseiller de ne pas aller en Inde, pays dont selon lui je ne supporterais pas le climat. Mais voyant que je ne renonçais pas à mon projet, il me donna pour m’accompagner plusieurs soldats turcs, dont un tarhan, connaissant le chinois et la langue de l’lnde. ll ajouta qu’autrement, réduit à mes propres moyens, je ne parviendrais pas à franchir les Himalayas. Quand nous nous séparâmes, il me fit cadeau d’un habit et de cinquante pièces d’étoffe de soie. A 4"li" (le li valait 576 m environ) de Suyab, j’arrivai dans la ville turque appelée Bing Yul (Mille sources). C’était un paradis d’arbres et de verdure. ll paraît que le Kaðan y passe les chaudes journées de l’été. J’ai traversé un grand nombre de villes turques. J’arrivai à Kunduz. Tardu chad, le fils ainé du Kaðan, y exerçait les fonctions de governeur. Il se trouvait malade, ce qui ne l’empêcha pas de me recevoir. Après avoir soigné le prince turc et l’avoir rétabli, je continuai ma route vers l’Inde."