HISTOIRE ABRÉGÉE
DE LA TURQUIE

 

Depuis les origines à l’avènement de la République

 

YILMAZ ÖZTUNA

 

DIRECTION GENERALE DE LA PRESSE ET DE L’INFORMATION

ABDULHAMID II
(1876-1909)

 
Frère de Mourad V, de deux ans son cadet, Abdülhamid II était un prince extrêmement fin et intelligent, avec des vues pénétrantes en matière de politique étrangère et fort autoritaires en ce qui concernait les affaires intérieures.

Dans les premiers mois de son règne, une constitution fut proclamée. Mais elle était inapplicable à un Empire composé d’une mosaïque de peuples divers. Le 13 février 1878, Abdülhamit II mit le Parlement en vacances pour une durée illimitée qui devait dépasser trente ans et prit tout le pouvoir en main. A partir de cette date le pays ne fut plus gouverné par la Sublime Porte mais par le palais de Yýldýz, résidence du souverain.

Mais avant d’avoir inauguré cette ère de pouvoir absolu, Abdülhamid II fut poussé par les ministres, dénués de sens politique et par les pressions des chefs de l’armée, à s’engager dans une guerre contre la Russie (1877-1878). Les Turcs remportèrent des succès dûs au maréchal Gazi Ahmed Muhtar Pacha sur le front du Caucase et au maréchal Gazi Osman pacha sur le front du Danube par trois fois à Plevne. A ce moment des Etats vassaux comme la Roumanie, la Serbie, le Monténégro se soulevèrent et prirent rang avec la Grèce, aux côtés de la Russie, ce qui contribua à la défaite de la Turquie. Les Russes arrivèrent jusqu’aux portes d’Istanbul.

Le 3 Mars 1878, la Russie forçait la Turquie à signer le traité de San Stefano qui mettait en évidence son dessein de l’anéantir.

Cependant, Abdülhamid II qui avait inauguré entre-temps l’ère du pouvoir personnel réussit grâce à un sens diplomatique remarquable, à susciter la méfiance des autres grandes puissances envers la Russie. Par le traité de Berlin (13 juillet 1878) les clauses les plus désastreuses du traité de San Stefano étaient annulées. Mais la Turquie vaincue sortait quand même avec de grandes pertes de cette guerre. Elle dut reconnaître l’indépendance de la Roumanie, de la Serbie et du Monténégro, accepter la formation d’une principauté bulgare vassale, dans le nord de la Bulgarie actuelle et, dans la partie Sud, la création d’une province de Roumélie orientale jouissant d’une certaine autonomie. La Thessalie fut abandonnée à la Grèce, le gouvernement de la Bosnie-Herzégovine remis à l’Autriche-Hongrie et celui de Chypre confié à l’Angleterre, sous condition toutefois que le Sultan garderait son droit de suzeraineté sur ces deux pays. La France qui avait pris pied en Algérie sous le règne de Mahmoud II, profita de l’occasion pour occuper la Tunisie. Ce fut après le traité de Karlovitz (1699), la plus grande récession de l’Empire ottoman en Europe. La Turquie perdait définitivement près de 340.000 km2 de territoires peuplés de 8 millions d’habitants en Europe. D’autres pertes de territoires s’ensuivirent.

En 1882, l’Angleterre occupa l’Egypte, tout en prétendant que les droits du Souverain ottoman étaient préservés . En 1885, la principauté de Bulgarie et la province de la Roumélie Orientale s’unirent. En 1897, la Grèce fut vaincue dans une courte guerre.

Au cours de ces dernières périodes de réformes, de réorganisation et d’absolutisme, on voit se généraliser un mouvement de reflux et de désintégration de l’Empire ottoman. On peut, cependant, considérer encore comme des moments heureux pour la Turquie, le règne d’Abdül-Medjid Ier, les premières années d’Abdülaziz et même, années de paix et d’équilibre du règne d’Abdülhamid II, sous lequel se poursuivit, le mouvement d’ouverture à l’influence occidentale qui entraina la modernisation des institutions, la fondation de nouveaux établissements d’enseignement et d’éducation de facultés et de hautes écoles, l’extension du réseau ferroviaire, ainsi que le développement des divers travaux publics.

L’art et la littérature, tout en subissant une certaine influence occidentale donnèrent de belles œuvres qui enrichirent la vie artistique et intellectuelle du pays. Dans la deuxième moitié du XVIIIème siècle, le grand-vizir Koca Râgýb pacha et surtout Þeyh Galib avaient atteint les plus hauts sommets dans le domaine de la poésie. En musique, Tab’î, Küçük Mehmed Aða, Sadullah Aða et le Sultan Selim III s’étaient tout particulièrement illustrés par des œuvres d’une inspiration élevée.

Au XIXème siècle, les grands noms de la poésie sont Ýzzet Molla, Galib Bey, Avnî Bey, Ziya Pacha et Namýk Kemal -ces deux derniers furent aussi des penseurs importants, -Abdulhak Hâmid Tarhan, Tevfik Fikret et Cenab Þehabeddin. Dans le domaine musical brillèrent notamment Ýsmail Dede Efendi, Dellâl-Zâde Ýsmail Efendi, Tanburî Osman Bey, Hacý Ârif Bey, Zekâî Dede. II faut encore citer les grands calligraphes Kazasker Râkým Efendi, Yesari-zade Moustapha Ýzzet Efendi, Kazasker Moustapha Ýzzet Efendi, le grand-vizir Ahmed Vefik Pacha, écrivain et érudit, remarquable traducteur et adapteur de Molière, l’historien renommé Cevdet Pacha, penseur, juriste et homme d’Etat, enfin le peintre Hamdi Bey qui encouragea l’archéologie et fonda le premier musée moderne en Turquie.