HISTOIRE ABRÉGÉE
DE LA TURQUIE

 

Depuis les origines à l’avènement de la République

 

YILMAZ ÖZTUNA

 

DIRECTION GENERALE DE LA PRESSE ET DE L’INFORMATION

MEHMED IV
(1648-1687)

 

 
Mehmed IV fut le plus jeune prince ottoman à accéder au trône où il parvint à l’âge de six ans et demi. La régence fut assumée jusqu’en 1651 par sa grand’mère la Grande-Validé-Sultane Kösem Mahpeyker. Celle- ci périt assassinée à la suite d’un soulèvement populaire contre les abus dont elle était responsable et de la découverte d’une tentative destinée à éliminer le Sultan, son petit-fils pour le remplacer par le cadet dont la mère était incapable de rivaliser avec elle. Sa disparition laissa la régence à la propre mère du Sultan, Hatice Tarhan Sultane, la plus jeune Sultane-Mère de l’histoire turque.

Cette jeune femme de vingt-quatre ans, très intelligente et charitable, mettait l’intérêt de l’Etat au-dessus de tout. L’Empire était retombé dans l’anarchie. Sous la régence de Kösem Sultane, appelée “le régne des Agas” les chefs des Janissaires avaient pris un grand pouvoir sur l’Etat et de nombreux grands-vizirs s’étaient succédé sans réussir à rétablir l’ordre. Hadice Tarhan Sultane se mit à l’œuvre avec une énergie inlassable. Enfin, le 15 septembre 1656, elle confia le gouvernement au grand-vizir Köprülü Mehmed Pacha. C’était un choix très judicieux. Ce vieillard de soixante-dix huit ans sut prendre des mesures sévères et efficaces qui rendirent tous son éclat à l’Empire ottoman. Avec lui commence une époque heureuse, dite “époque des Köprülü” et qui devait durer vingt sept ans, plusieurs membres de sa famille ayant occupé après lui, le poste de Grand-Vizir. On doit à la Sultane-Mère Hatice Tarhan Validé, outre les deux grandes mosquées d’Istanbul et d’Üsküdar, de nombreux ouvrages de travaux publics et des établissements sociaux situés jusque dans les régions les plus reculées de la Turquie.

Durant le Grand-Vizirat de Köprülü Mehmed Pacha, le Khan de Crimée, Mehmed Giray infligea, à la bataille de Konotop (12 juillet 1659), une terrible défaite à l’armée russe, commandée par le prince Troubetskoï, qui y perdit la vie ainsi que 120.000 hommes. 50.000 soldats de l’armée russe furent faits prisonniers. A cette époque, deux grands Etats de l’Europe oriantale, la Russie et la Pologne versaient un tribut annuel au Khan de Crimée.
Le vieux Köprülü mourut en 1661. Son fils de vingt-six ans, le plus jeune premier ministre de l’histoire turque, Fazýl Ahmed Pacha le remplaça.

En 1663, la guerre éclata de nouveau entre l’Empire ottoman et l’Empire germanique. Köprülü Ahmed Fazýl Pacha se couvrit de gloire en reprenant la place d’Uyvar, puis il passa en Crète et enleva Candie aux Vénitiens qui s’y étaient maintenus pendant quelques années avec l’aide de presque toute l’Europe, parachevant ainsi la conquête de l’île.
Mehmed IV entreprit en 1672 et en 1673, deux campagnes contre la Pologne qui dut s’incliner et accepter des conditions sévères, entre autres celle de verser un tribut annuel à l’Empire ottoman.

Köprülü Ahmed Fazýl Pacha mourut à quarante et un ans, après avoir exercé les fonctions de grand-vizir pendant plus de quinze ans. Son beau-frère Merzifonlu Kara Moustapha Pacha, fils adoptif et gendre du vieux Köprülü fut appelé à devenir grand-vizir. II accompagna deux fois en 1678 et en 1680, le Sultan Mehmed IV, dans ses campagnes de Russie.

La guerre avec l’Empire germanique recommença, Mehmed IV prit d’abord la tête de ses armées, mais confia en chemin le commandement en chef à son grand-vizir Kara Moustapha Pacha. Celui-ci investit Vienne en 1683 mais échoua dans sa tentative. Trahi par le Khan de Crimée et par un Vizir, il fut vaincu par les Coalisés et exécuté à Belgrade, victime des calomnies de ses rivaux. Le Sultan qui avait sacrifié son premier ministre ne réuissit pas à le remplacer par un homme de même valeur et subit les conséquences de cette faute en perdant lui-même son trône après un régne de trente-neuf ans. Il survécut cependant à sa déposition et passa ses cinq dernières années dans les palais d’Istanbul et d’Edirne avec ses deux fils, les futurs sultans Moustapha II et Ahmed III. Il avait acquis sous la régence fort intelligente de sa mère et sous l’administration énergique et habile du vieux Köprülü, l’habitude de toujours prendre en considération les avis du Divan et du Grand-Vizir, à la différence de son contemporain Louis XIV. Il fut surnommé “le chasseur” à cause de sa passion pour cette distraction.

Après la déposition de Mehmed IV il y eut un moment d’hésitation au sujet de la succession. C’est alors que fut adopté définitivement le sytème qui reconnut pour héritier du trône le prince aîné de la famille. Ce furent donc les frères de Mehmed IV, Soliman III (1687-1691) et Ahmed II (1691-1695) qui lui succédèrent.