Tant que la puissance des Göktürk suivit une courbe ascendante,
l’armée turque fut la force militaire la plus formidable de
l’Asie. Ce qu’étaient l’infanterie mácedonnienne et la romaine en
Europe, la cavalerie turque l’était par sa rapidité. Si une
expédition n’étant pas achevée rapidement, perdait son caractère
de surprise, on la considérait comme un échec, une catastrophe.
Dans le monde chinois, étant donné la densité de sa population, le
succès n’etait possible que grâce à cette tactique des steppes.
L’armée turque de cavaliers, s’avançant à marches forcées diurnes
et nocturnes, les cavailers enfourchant alternativement leurs deux
chevaux, dont l’un de rechange, fondait au moment le plus
inattendu sur l’armée ennemie, sans lui laisser le temps d’être
informée. Si l’armée ennemie était très nombreuse, l’armée turque
n’acceptait pas la bataille, évitant ainsi tout risque. Elle
battait en retraite, et la désolation des terres turques jetant
l’ennemi dans le désarroi, celui-ci, harcelé par les attaques de
guerilla, isolé à des centaines de kilomètres de sa base, était
accablé et détruit par la cavalerie turque lorsque son épuisement
était à son comble. L’ennemi redoutait la distance, or c’était
l’élément dont les Turcs se souciaient le moins. C’est ainsi que
les immenses armées chinoises et iraniennes, alourdies de classes
auxiliaires et d’esclaves, étaient écrasées par la cavalerie
légère des Turcs sans que le rapport des forces entrât en ligne de
compte. Vers 705 ou 710, c’est à dire pendant une des ères de
force et de prospérité du Hâkanat, l’armée turque comptait 230 000
hommes.
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